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Les multiples vies du mobilier professionnel

, par Erick Demangeon

Reconditionner un meuble professionnel réduit jusqu’à 80 % les émissions de CO2 pour un coût inférieur d’environ 40 % par rapport au neuf. La filière REP ameublement a mis en place un réseau logistique de collecte permettant de valoriser à plus de 93 % les déchets d’ameublement. Parmi ses bénéficiaires, le groupe Manutan a intégré à son catalogue une offre circulaire opérée depuis un hub logistique ad hoc installé au Bourget (93).

À la suite d’un déménagement sur un site du groupe SNCF, plus de 2 000 plateaux de bureaux ont été transformés en plancher pour un bâtiment neuf en construction. Mené par La Halle du réemploi solidaire (groupe GIEM), ce projet illustre le potentiel du réemploi des déchets d’éléments d’ameublement (DEA) professionnels. « 250 000 t d’éléments d’ameublement professionnels sont mises sur le marché chaque année », estime ainsi Arnaud Humbert-Droz, président exécutif de Valdelia, l’un des trois éco-organismes agréés dans cette filière avec Valobat et Ecomaison, davantage spécialisé dans les DEA ménagers. Au final, 100 000 à 130 000 t sont disponibles à la collecte chaque année dont «  Valdelia en assure jusqu’à 80 % », affirme le dirigeant. Le réemploi et la réutilisation des DEA professionnels sont en croissance depuis 2020 et la loi Agec. Celle-ci impose aux entreprises publiques d’acheter au moins 20 % de mobilier de bureau issu du réemploi.

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Arnaud Humbert-Droz, président exécutif de Valdelia
Valdelia

Un tiers des DEA collectés provient du secteur tertiaire et autant des collectivités locales et administrations publiques, comme les établissements scolaires et hospitaliers. Le reste est composé de mobilier technique issu de secteurs tels que le retail. Toutes origines confondues, 79 % des DEA ont été recyclés en 2023 ; leurs matières extraites servant à la fabrication de nouveaux produits. La part du réemploi et de la revalorisation énergétique s’est élevée à 7 % chacune. «  Supérieur à 93 %, le taux de valorisation des DEA est très élevé et leur valorisation est majoritairement réalisée en France  », confirme Arnaud Humbert-Droz.

Collecte « préservante »

Appelé LEO, le système d’information de Valdelia permet aux entreprises qui souhaitent évacuer leurs DEA d’en faire l’inventaire. « Notre mission depuis 2012 est d’aller chercher les DEA, de les préparer et les trier pour les livrer à des centres de traitement et des ateliers de reconditionnement. Le réseau logistique et la capacité à tracer les flux à chaque étape sont essentiels pour remplir cette mission », présente Arnaud Humbert-Droz.

Lorsque les volumes sont supérieurs à 20 m3, un enlèvement est planifié avec pose et retrait de contenants. Ces opérations sont réalisées par 130 collecteurs référencés par l’éco-organisme. Pilotant leurs propres moyens de transport et d’évacuation, à l’image de Paprec, Praxy, Suez ou Veolia, les collecteurs acheminent les DEA vers 62 centres de regroupement et de tri (certains étant gérés par ces derniers). Puis, une dizaine de transporteurs, pour compte propre ou d’autrui tels que Mauffrey et Brangeon, les transporte en vrac vers 130 centres de traitement, de recyclage et de valorisation ou des exutoires finals (panneautiers, cimenteries, aciéries, centres d’enfouissement, etc.).

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Valdelia a testé le fluvial dans sa supply chain.
Valdelia

Lorsqu’il est encore en bon état, le mobilier peut être réemployé ou réutilisé. Il est alors orienté vers 260 structures de l’économie sociale et solidaire qui viennent le collecter. Parmi ces structures, certaines disposent d’un atelier de reconditionnement. «  La solution proposée à nos 1200 entreprises adhérentes contre leur écocontribution est clé en main et va jusqu’à l’écoconception des produits. Elle est tracée à chaque étape avec remise d’attestations », souligne Arnaud Humbert-Droz.

La croissance du réemploi, du suprarecyclage (upcycling) ou de la revente d’occasion des DEA professionnels alimente la concurrence entre acteurs de la filière à la recherche de gisements de qualité. « Au sein de Valdelia, une équipe de 11 personnes est en charge d’identifier les projets locaux avec une dimension mobilière, comme les déménagements de siège ou la fermeture de site  », indique Arnaud Humbert-Droz. Cette équipe accompagne aussi les entreprises dans leurs démarches pour évacuer les mobiliers usagés.
La recherche de gisements de qualité a conduit Valdelia à nouer des collaborations avec des déménageurs. « Leurs véhicules, équipés de hayons, permettent de réaliser des collectes préservantes, notamment dans les métropoles où la pose de bennes est difficile  », explique-t-il. « En place depuis deux ans en Île-de-France, ce schéma qui comprend un tri permet de remettre des DEA de qualité à des ateliers de reconditionnement. Un projet identique est envisagé en région PACA. »

Mutualiser pour optimiser

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Pierre-Emmanuel Saint-Esprit, directeur Economie circulaire du groupe Manutan
Manutan

Le hub circulaire du groupe Manutan dédié au réemploi de mobilier professionnel usagé est l’un des bénéficiaires de cette collecte préservante. Son ouverture, en janvier 2024, par le distributeur d’équipements et de fournitures aux entreprises et collectivités «  s’inscrit dans notre stratégie qui prévoit la neutralité carbone d’ici 2050. Elle répond aussi à la demande de nos clients engagés dans le même objectif et aux nouvelles obligations issues de la loi Agec. Le hub est aussi un moyen de renforcer notre supply chain face aux tensions mondiales sur les matières premières  », partage Pierre-Emmanuel Saint-Esprit, directeur Économie circulaire du groupe Manutan. Dix-huit mois après son lancement, la nouvelle offre circulaire «  a trouvé son marché et est désormais intégrée à notre catalogue en France mais aussi en Belgique, aux Pays-Bas et en Italie où des collectes également sont organisées. »

Aménagé sur 3 000 m2 au Bourget dans un quartier prioritaire, le hub «  a été créé sur le modèle d’une start-up autour de nouveaux process dont logistiques  ». Depuis son lancement, il a réceptionné 70 000 produits issus de 300 déménagements. Une fois reconditionnés, « ils rejoignent notre catalogue et s’intègrent à la supply de nos produits neufs. La mutualisation avec l’organisation logistique et commerciale existante est une source essentielle d’optimisation des coûts  ». L’engagement de qualité assorti de garanties identiques aux produits neufs est une autre condition de succès, selon Pierre-Emmanuel Saint-Esprit. « Plus d’un millier de clients, dont une cinquantaine de sites de clients figurant au CAC 40, ont testé et choisi notre offre circulaire. » Une partie des meubles reconditionnés est également donnée à des ressourceries, à l’image de Sud Oise Recyclerie.

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Showroom sur le hub circulaire du groupe Manutan au Bourget
Manutan

Selon le responsable, «  60 % de nos commandes sont hybrides, composées d’articles neufs et reconditionnés  ». Le groupe Manutan étudie un nouveau modèle baptisé Reconditionnement as a Service, où, dans le cas d’une commande d’un millier d’articles par exemple, une partie serait satisfaite avec des produits neufs, une autre par le reconditionnement des produits du client.
Avec un prix du reconditionné inférieur de 30 à 40 % par rapport à un article neuf, le groupe Manutan ambitionne de réaliser 10 % de son chiffre d’affaires avec son offre circulaire d’ici 2035.

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